Une énième chaîne d'information en continu s'est ajoutée ce mois-ci sans tambour ni trompette au paysage médiatique arabe "post printemps arabe": Sky News Arabia (basée à Abu Dhabi), propriété du magnat australien Rupert Murdoch - en mauvaise posture en raison de l'affaire des écoutes illicites en Angleterre - et du prince milliardaire saoudien Walid ben Talal. Ce dernier devrait aussi lancer bientôt une nouvelle chaîne d'information financière en collaboration avec l'agence Bloomberg. Il y a déjà comme chaînes d'information en continu en arabe Al Jazeera (Qatar), Al Arabiya (appartenant à des Saoudiens mais basée à Dubaï), Al Alam (Téhéran), Al Hourra (Washington), CNBC Arabia, France 24, BBC, Russia Today... Et j'en oublie.
Pourquoi tant de chaînes d'information en arabe? Parce que le marché est lucratif? Pas du tout. (Des gens du milieu parlent de déficits atteignant quelques milliards de dollars pour le millier de chaînes que comptent au total les pays arabes. Le vaste marché hispanophone est sans doute plus lucratif mais il ne compte que très peu de chaînes d'information internationales, ce qui montre son peu d'intérêt stratégique). Mais tout simplement parce que la télévision est dans les mondes arabes, cette zone stratégique clef riche en pétrole, un formidable levier politique et social comme l'a démontré ces dernières années la chaîne al-Jazeera. Le Liban me paraît une bonne illustration de cette situation: ce pays d'à peine 4 millions d'habitants, sans ressources naturelles, compte presque autant de chaînes de télévision qu'il a de partis politiques. Car si la télévision offre un reflet de la réalité, c'est presque toujours une réalité déformée par le prisme des idéologies ou des affiliations politiques, sociales ou religieuses. Et pas seulement dans les mondes arabes, Fox News aux Etats-Unis n'est certainement pas un modèle d'impartialité et d'objectivité dans sa "croisade" contre Barack Obama ou dans sa perception du conflit israélo-palestinien. La Russie n'a pas laissé libres très longtemps ses chaînes de télé après la chute de l'URSS...
La chaîne Al Arabiya se veut le fer de lance de la campagne de contestation contre les régimes syrien de Bachar al-Assad et iranien de Mahmoud Ahmadinejad. La chaîne multiplie les reportages et images très choquantes en provenance de Syrie - à nous donner le tournis et la nausée devant tant d'horreurs (je n'arrive plus à la regarder, tellement c'est trop) - mais ne dit mot sur la situation au Bahreïn où les troupes saoudiennes et émiraties avaient été envoyées en renfort pour mater des manifestants pro-démocratiques majoritairement de confession chiite. Al Manar, la chaîne du parti chiite libanais Hezbollah, présente les choses exactement à l'inverse d'Al Arabiya (le régime syrien "aimé de son peuple" est la victime de mercenaires dirigés par les "ennemis" de la résistance à Israël), insistant par ailleurs longuement dans ses bulletins sur la contestation au Bahreïn.
La liberté d'expression est toujours conditionnelle et réussit à se faire entendre plus ou moins selon ses thèmes (la religion, le sexe, sont des tabous) et les régimes. Les mondes arabes ne font pas exception à cette règle. On y constatera un vrai changement, une vraie "révolution", le jour où les grandes chaînes arabes témoigneront de façon professionnelle, éthique, critique, de ce qui se passe chez elles, dans leur propre pays, dans leur propre "camp".
Pourquoi tant de chaînes d'information en arabe? Parce que le marché est lucratif? Pas du tout. (Des gens du milieu parlent de déficits atteignant quelques milliards de dollars pour le millier de chaînes que comptent au total les pays arabes. Le vaste marché hispanophone est sans doute plus lucratif mais il ne compte que très peu de chaînes d'information internationales, ce qui montre son peu d'intérêt stratégique). Mais tout simplement parce que la télévision est dans les mondes arabes, cette zone stratégique clef riche en pétrole, un formidable levier politique et social comme l'a démontré ces dernières années la chaîne al-Jazeera. Le Liban me paraît une bonne illustration de cette situation: ce pays d'à peine 4 millions d'habitants, sans ressources naturelles, compte presque autant de chaînes de télévision qu'il a de partis politiques. Car si la télévision offre un reflet de la réalité, c'est presque toujours une réalité déformée par le prisme des idéologies ou des affiliations politiques, sociales ou religieuses. Et pas seulement dans les mondes arabes, Fox News aux Etats-Unis n'est certainement pas un modèle d'impartialité et d'objectivité dans sa "croisade" contre Barack Obama ou dans sa perception du conflit israélo-palestinien. La Russie n'a pas laissé libres très longtemps ses chaînes de télé après la chute de l'URSS...
La chaîne Al Arabiya se veut le fer de lance de la campagne de contestation contre les régimes syrien de Bachar al-Assad et iranien de Mahmoud Ahmadinejad. La chaîne multiplie les reportages et images très choquantes en provenance de Syrie - à nous donner le tournis et la nausée devant tant d'horreurs (je n'arrive plus à la regarder, tellement c'est trop) - mais ne dit mot sur la situation au Bahreïn où les troupes saoudiennes et émiraties avaient été envoyées en renfort pour mater des manifestants pro-démocratiques majoritairement de confession chiite. Al Manar, la chaîne du parti chiite libanais Hezbollah, présente les choses exactement à l'inverse d'Al Arabiya (le régime syrien "aimé de son peuple" est la victime de mercenaires dirigés par les "ennemis" de la résistance à Israël), insistant par ailleurs longuement dans ses bulletins sur la contestation au Bahreïn.
La liberté d'expression est toujours conditionnelle et réussit à se faire entendre plus ou moins selon ses thèmes (la religion, le sexe, sont des tabous) et les régimes. Les mondes arabes ne font pas exception à cette règle. On y constatera un vrai changement, une vraie "révolution", le jour où les grandes chaînes arabes témoigneront de façon professionnelle, éthique, critique, de ce qui se passe chez elles, dans leur propre pays, dans leur propre "camp".
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